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Les traditions funéraires chez les enfants à travers l’histoire et les cultures

La mort d’un enfant est l’une des expériences les plus déchirantes que l’on puisse vivre. Cette épreuve est universelle et traverse l’histoire et les cultures. Cependant, la façon dont nous rendons hommage à ces jeunes vies interrompues varie considérablement. Cet article examinera comment différentes cultures et périodes historiques ont traité les rites funéraires pour les enfants.

L’Antiquité : Grèce et Rome

Dans l’Antiquité grecque et romaine, une distinction claire existait entre les rituels funéraires pour les enfants et les adultes. Les sociétés de l’époque réservaient des cérémonies plus élaborées aux adultes, non pas par manque d’affection pour les enfants, mais comme une adaptation à une réalité marquée par une mortalité infantile élevée.

Les Romains, considérant souvent les enfants comme n’ayant pas atteint « l’aetas » ou l’âge de raison, ne les inhumait pas avec les adultes. Ils percevaient les enfants comme étant au seuil de la vie, les éloignant ainsi du monde spirituel des adultes. En conséquence, les Grecs avaient l’habitude d’inhumer les enfants le long des routes, un espace intermédiaire entre le foyer et l’extérieur.

En transition, les sociétés de l’Antiquité effectuaient souvent les rites funéraires pour les enfants la nuit, une coutume bienveillante mais enveloppée de mystère, destinée à alléger le fardeau de chagrin des parents. Les Romains, en effet, associaient le chagrin excessif au retour des « larvae », des esprits malfaisants, et non spécifiquement des esprits des enfants défunts.

Malgré la simplicité de certains de ces rituels, l’inhumation des enfants s’accompagnait souvent d’objets tels que des poupées ou des jouets, symbolisant l’amour et l’affection de leurs proches. Par exemple, une tombe près de Vaison-la-Romaine, en France, où un enfant repose éternellement agrippé à sa poupée de terre cuite, illustre la profonde tendresse de ces rites.

Le Moyen Âge : Europe

Au Moyen Âge, des maladies et la malnutrition provoquaient fréquemment la mort infantile, une réalité que les communautés de l’époque ressentaient profondément. De nombreux écrits et prières témoignent de cette douleur partagée. La foi chrétienne dominante influençait fortement les rituels funéraires dédiés aux enfants à cette époque. Les communautés enterraient souvent les enfants non baptisés en dehors des terres consacrées, tandis qu’elles plaçaient les enfants baptisés aux côtés des adultes, marquant ainsi leur intégration dans la communauté chrétienne.

En transition, le village de Wharram Percy dans le nord du Yorkshire révèle des pratiques et croyances médiévales uniques autour de la mort. Des archéologues y ont découvert des ossements mutilés, datant du XIe au XIVe siècle, indiquant une crainte des habitants face au retour des morts. Ils mutilaient donc les corps pour s’assurer qu’ils ne quittent pas leurs tombes. Ces mutilations, telles que des coupures, des brûlures, et des décapitations, avaient probablement pour but d’empêcher les morts de marcher et d’attaquer les vivants ou de propager des maladies.

Ces découvertes à Wharram Percy démontrent non seulement que la peur des morts revenant hanter les vivants trouve ses origines dans le Moyen Âge, mais elles prouvent également l’existence de telles pratiques en Angleterre à cette époque. Elles illustrent la diversité et la complexité des croyances et des pratiques funéraires médiévales, reflétant les diverses préoccupations, espoirs, et peurs des sociétés de l’époque.

L’Afrique traditionnelle

L’Afrique, avec sa riche diversité, possède des rituels funéraires distincts pour les enfants, mais tous témoignent d’un profond respect pour le cycle de vie et de mort.

De nombreuses cultures africaines voient le décès d’un enfant comme surnaturel, souvent lié à des forces ou esprits maléfiques. Les Yoruba du Nigeria, par exemple, croient en des enfants « abiku », des âmes éphémères causant du chagrin aux parents. Des rituels spécifiques cherchent à apaiser ces esprits.

Les cérémonies funéraires, bien que plus discrètes que celles des adultes, restent significatives. Il est courant d’enterrer les enfants près de chez eux, espérant une réincarnation familiale. Les Zoulous, par exemple, enterrent souvent les jeunes enfants à la maison, affirmant ainsi le lien entre l’enfant et sa communauté.

Chez les Akan du Ghana, le décès d’un enfant devient une célébration, vu comme une transition vers une autre vie. La musique et la danse dominent ces funérailles, reflétant la foi en la réincarnation.

En somme, les rituels funéraires pour enfants en Afrique mettent en exergue une palette de croyances, soulignant une perception profonde du cycle de vie et une empathie pour les plus jeunes.

L’Asie : Chine

En Chine, des traditions et croyances profondément enracinées façonnent les rites funéraires pour les enfants, où la douleur de la perte infantile s’entrelace avec des valeurs culturelles et spirituelles. Historiquement, le respect des ancêtres et la lignée familiale ont une importance primordiale dans la société chinoise, et la perte d’un enfant est perçue comme une menace à la continuité de la famille. Ainsi, bien que les cérémonies funéraires pour les enfants ne soient pas aussi élaborées que celles des adultes, en raison de leur contribution moindre à la société et à la famille, la douleur ressentie n’est pas moindre.

…et Japon

Au Japon, le bouddhisme sculpte les rites funéraires pour enfants. Les « mizuko kuyō », ou rituels pour « l’enfant de l’eau », permettent aux parents d’exprimer leur deuil tout en guidant l’enfant vers l’au-delà. Jizō, divinité bouddhiste, incarne le protecteur des enfants défunts. De nombreuses effigies de Jizō, parées de bonnets ou bavoirs rouges, peuplent les temples, témoignant du lien entre vivants et défunts tout en offrant un havre de paix aux endeuillés. Le temple Zojoji à Tokyo illustre poignamment ce rituel avec des milliers de statues de Jizō, chacune symbolisant un enfant disparu. Ce mémorial collectif incarne l’empathie et la compassion de la culture japonaise face à la perte.

En somme, les rites funéraires autochtones pour les enfants témoignent d’un profond respect pour la vie et la mort, accompagnant l’enfant dans sa transition tout en apportant réconfort aux endeuillés.


Pour aller plus loin :

La Rome d’Auguste : la mort et les rites funéraires

Archéologie : quand les Romains honoraient la vie dès la conception

Obsèques au Moyen Age

Ondoiement

« The Walking Dead » au Moyen Age : des Anglais mutilaient les morts pour qu’ils ne reviennent pas les hanter

Infanticides chez les Romains

Abiku

Mythes et réalités: les enfants nés-pour-mourir enAfrique de l’Ouest

Chinese Funeral Traditions

Mizuko kuyō

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